J’ai écrit les premiers mots de ce qui allait devenir les paroles de « Summertime Departures » alors que je vivais dans la ville éblouissante de Tanger, où j’ai en quelque sorte dérivé dans un moment de grande confusion. Le décès de mon père étant l’élément déclencheur principal du vide qui faisait écho en moi et que je ne pouvais plus ignorer après des années à essayer d’éviter tout type d’honnêteté introspective sur ce qui semblait être une existence absurde à ce stade de ma vie.
Ma façon de gérer tout cela fut le silence et l’isolement, même si sa présence, ses souvenirs et sa mémoire, autant que toutes les questions et le ressentiment qui l’accompagnaient, me hantaient. Je rêvais si souvent de conversations que nous n’avions jamais eues que je pensais devenir fou, sinon obsédé. Je me demandais si c’était de la peine, de la culpabilité, de la colère, mais c’était quelque chose d’intangible. Mon père a consacré la majeure partie de sa vie à ses fortes croyances spirituelles et il a cru jusqu’à la fin qu’il serait guéri. Même s’il savait que son cancer était incurable, il a chanté et loué jusqu’à son dernier souffle. Il était tellement convaincu de sa guérison miraculeuse qu’il n’a jamais pensé qu’il serait nécessaire d’écrire quelques mots de lui-même, de partager des histoires jamais racontées ou ce qu’il faisait de sa situation… Cette conviction profonde me troubla incroyablement, surtout après son décès, mais j’ai refusé d’aborder tout ça… Jusqu’à ce que j’arrive à Tanger… Et je savais que je devais le faire.
Être témoin de la façon dont les gens qui font de Tanger un lieu unique pour connecter avec la notion du “maintenant” m’a offert une perspective à laquelle je ne pouvais plus échapper, quelque chose qui allait bien au-delà du deuil, de la vie, de la mort et de moi-même. Par conséquent, j’ai commencé à écrire. Tout a commencé à faire du sens avec l’image de la pierre posée sur un sanctuaire… Ce fut le point de départ. Ce fut le point de départ un peu étrange mais significatif pour moi et pour la chanson elle-même. L’idée était une « balise » témoignant de la fondation qu’une personne pouvait avoir été dans nos vies… une pierre « commune » transcendant toute sorte d’ornements précieux.
Cette image m’a amené à me demander ce qu’il nous reste finalement, quand le temps passe, quand les êtres chers disparaissent, quand les promesses s’évanouissent avec les souvenirs de ceux que nous aimions, quand les noms ne sont plus mentionnés, quand nos plus beaux souvenirs de quelqu’un que nous chérissions font de la place pour le coeur de quelqu’un d’autre, lorsque les couleurs vives des fleurs ont disparu depuis longtemps, lorsque le temps respecte son serment et nous rattrape, lorsque les rêves et leurs espoirs brillent, quand nous sommes une âme sans visage à la vue de quelqu’un d’autre, quand nous sommes perdus au gré des vents… Quand il n’y a pas de bien ou de mal dans la mort…
Et donc, en le considérant maintenant avec la perspective honnête de mes propres paradoxes et de ma vulnérabilité, je comprends que “Summertime Departures” est ma façon de dire qu’indépendamment de ce que nous avons passé toute notre vie à croire ou de ce que nous avons oublié avec le temps, il y a une pérennité au milieu des peines les plus douloureuses et notre décision de lâcher prise à travers l’acceptation que l’amour, tout comme la pierre, durera toujours.