
Édition N°39
Journée d’hôpital ; comme la vie et la mort
Bien que c’était dans les plans depuis longtemps, passer toute une journée à l’hôpital pour enchaîner une multitude de tests et courir d’un spécialiste à l’autre n’est pas exactement ce que j’appellerais un bon moment, même si je suis revenu à Montréal précisément pour cette raison : ma santé.
J’ai toujours été assez réticent à bouleverser mon emploi du temps, déjà bien chargé, mais cette fois-ci, je savais que je devais y aller, peu importe mes engagements et l’endroit d’où je venais dans le monde. J’ai eu trop d’épisodes de vertiges, de quasi-évanouissements, de fatigue extrême et de pertes de mémoire ces derniers mois, qui n’étaient rien en comparaison des violents maux de tête quotidiens que j’ai endurés ces trois dernières semaines. Ignorer la gravité potentielle de mon état aurait donc été une pure négligence de ma part.
J’ai toujours été assez réticent à bouleverser mon emploi du temps, déjà bien chargé, mais cette fois-ci, je savais que je devais y aller, peu importe mes engagements et l’endroit d’où je venais dans le monde. J’ai eu trop d’épisodes de vertiges, de quasi-évanouissements, de fatigue extrême et de pertes de mémoire ces derniers mois, qui n’étaient rien en comparaison des violents maux de tête quotidiens que j’ai endurés ces trois dernières semaines. Ignorer la gravité potentielle de mon état aurait donc été une pure négligence de ma part.

J’ai une relation étrange avec les hôpitaux de façon générale et avec le fait d’y être en particulier, une sorte de relation haine-haine (oui, haine-haine). Cela remonte probablement à mon enfance, quand j’ai littéralement vécu à l’Hôpital de Montréal pour enfants assez longtemps pour croire que c’était ma maison… Entre 3 et 7 ans, j’ai passé plus de temps entouré d’infirmières et de médecins qu’avec mes propres parents. C’était “normal” pour moi. Je plaisantais souvent en demandant à ma mère s’ils devaient payer un loyer pour moi ou si c’était juste une façon pour elle et mon père d’avoir un peu de temps en tête-à-tête. Ma mère me répondait toujours avec véhémence : « Comment peux-tu rire ?! On a eu peur de te perdre à chaque jour, chaque jour, Alex !!! » Comment dire… J’ai tendance à avoir un humour un peu particulier quand il s’agit de mes propres “tragédies”, mais là… Non, c’est limite pas cool, surtout pour ma mère, qui est d’ordinaire la personne la plus déterminée au monde. Elle a traversé tellement d’épreuves sans jamais perdre ni sa foi, ni sa détermination inébranlable, ni sa présence réconfortante. Elle a ce petit quelque chose qui est difficile à expliquer. Si la canonisation est encore d’actualité, elle mérite clairement une place au panthéon des saintes. « Mais quel miracle a-t-elle accompli ? » me demanderez-vous… Sans hésitation, avoir dû gérer qui j’étais ! Elle mériterait déjà une médaille rien que pour avoir survécu à mon adolescence tout en gardant l’espoir que je trouverais ma voie un jour, et elle continue encore aujourd’hui. Si tu lis ceci, Maman (et pas de doute, elle lit, elle s’assure de la véracité de chacun de mes propos… oui, c’est envahissant, voire troublant, mais au moins, ça m’oblige à être honnête, non ?!), je t’aime, maman. 😉

Bon, je m’égare… Ma relation de haine-haine avec les hôpitaux. Honnêtement, elle n’a pas grand-chose à voir avec mon enfance passée à l’hôpital, quand j’y pense, car chaque membre du personnel médical a toujours été d’une bienveillance et d’un dévouement absolus envers moi. Ils n’arrêtaient pas de dire que je deviendrais médecin… Évidemment ! Et d’une certaine façon, c’est presque arrivé : selon les standards universitaires, je suis travailleur social (enfin, presque… La musique a croisé mon chemin et il me manque encore quelques crédits pour avoir mon diplôme en bonne et due forme). Donc, quand j’étais enfant, je n’ai jamais pensé que passer plusieurs Noëls à l’hôpital était triste ou déprimant ; c’était juste la vie. Je me demandais souvent pourquoi mes parents pleuraient à chaque visite : en arrivant, en repartant (toujours bien après l’heure des visites — à 5 ans, j’avais déjà une mauvaise influence sur tout le système. Devenir médecin ? Peut-être. Un rebelle ? Définitivement !). Quand on est enfant, on ne se soucie pas vraiment de sa situation (en rétrospect, peut-être que j’aurais dû), et ma réalité, aussi illusoire qu’elle ait pu être, n’avait pas pour moi la gravité qu’elle imposait aux autres. Mon vrai souci, c’était mes parents qui pleuraient tout le temps, parce que je pensais que j’avais fait quelque chose de mal. Mais non, je n’avais rien fait de mal… J’étais juste malade. Il n’y avait aucun mal là-dedans. Jusqu’à ce qu’on avance rapidement dans le temps, à mes 13-17 ans. Là, non seulement je savais que je faisais toutes sortes de choses « mal », mais j’étais littéralement l’incarnation du « mal ». Mais bon, il fallait bien que je rattrape un peu la vie, non ?!
Je crois que ma perception des hôpitaux a surtout été marquée par la maladie et la mort, que j’ai côtoyées dès mon plus jeune âge. Tout a commencé avec ces enfants qui “disparaissaient” de notre chambre commune, suivis des cris de douleur de leurs proches résonnant dans les couloirs. J’ai appris la notion d’« être avec Jésus » avant même de connaître réellement qui il était. Mon grand-père Henry, que j’adorais, est décédé quand j’avais 6 ans. Ma grand-mère Manse est morte à 57 ans, alors que j’étais à peine adolescent. Mon grand-père Jack est parti quand j’avais 13 ans, à peu près au même moment où ma tante a succombé à un cancer à seulement 42 ans. Et ainsi de suite, encore et encore… Je sais bien que la mort fait partie du cycle de la vie, évidemment. On peut intégrer cette notion avec rationalité une fois adulte… jusqu’à ce qu’elle frappe en plein cœur, je suppose. Dans mon cas, ça a eu lieu lorsque j’étais aux côtés de mon père, lorsqu’il a rendu son dernier souffle, allongé sur son lit d’hôpital. Il s’est éteint à 61 ans, emporté par un cancer diagnostiqué bien trop tard, après des années d’erreurs médicales. « C’est dans votre tête, M. Foster, rien d’inquiétant. » Non, ce n’était pas dans sa tête. C’était dans son pancréas, sa prostate, ses poumons, ses glandes, et partout ailleurs. Pas mal, pour un mauvais diagnostic… Mais c’est une conclusion facile à tirer de ma part. Pour chaque erreur, il y a une quantité incroyable de vies sauvées. Ça n’empêche pas que la douleur est décuplée quand on se retrouve du mauvais côté du verdict, et la logique n’empêche pas les émotions de vous ronger de l’intérieur. La perte de mon père a laissé en moi un poids insupportable, bien trop lourd pour que ma lucidité puisse me procurer ne serait-ce qu’un semblant de réconfort rationnel. On apprend à accepter, mais on ne guérit jamais vraiment.
Je crois que ma perception des hôpitaux a surtout été marquée par la maladie et la mort, que j’ai côtoyées dès mon plus jeune âge. Tout a commencé avec ces enfants qui “disparaissaient” de notre chambre commune, suivis des cris de douleur de leurs proches résonnant dans les couloirs. J’ai appris la notion d’« être avec Jésus » avant même de connaître réellement qui il était. Mon grand-père Henry, que j’adorais, est décédé quand j’avais 6 ans. Ma grand-mère Manse est morte à 57 ans, alors que j’étais à peine adolescent. Mon grand-père Jack est parti quand j’avais 13 ans, à peu près au même moment où ma tante a succombé à un cancer à seulement 42 ans. Et ainsi de suite, encore et encore… Je sais bien que la mort fait partie du cycle de la vie, évidemment. On peut intégrer cette notion avec rationalité une fois adulte… jusqu’à ce qu’elle frappe en plein cœur, je suppose. Dans mon cas, ça a eu lieu lorsque j’étais aux côtés de mon père, lorsqu’il a rendu son dernier souffle, allongé sur son lit d’hôpital. Il s’est éteint à 61 ans, emporté par un cancer diagnostiqué bien trop tard, après des années d’erreurs médicales. « C’est dans votre tête, M. Foster, rien d’inquiétant. » Non, ce n’était pas dans sa tête. C’était dans son pancréas, sa prostate, ses poumons, ses glandes, et partout ailleurs. Pas mal, pour un mauvais diagnostic… Mais c’est une conclusion facile à tirer de ma part. Pour chaque erreur, il y a une quantité incroyable de vies sauvées. Ça n’empêche pas que la douleur est décuplée quand on se retrouve du mauvais côté du verdict, et la logique n’empêche pas les émotions de vous ronger de l’intérieur. La perte de mon père a laissé en moi un poids insupportable, bien trop lourd pour que ma lucidité puisse me procurer ne serait-ce qu’un semblant de réconfort rationnel. On apprend à accepter, mais on ne guérit jamais vraiment.

Revenons donc aux tests d’aujourd’hui… Je ne sais pas vraiment à quoi m’attendre ni quoi en penser. Je suis en vie, et c’est déjà un miracle en soi. Mais je ne peux pas dire que je me sens mieux depuis que ma vie a été sauvée. Encore une fois, il ne faut pas se tromper ; je suis immensément reconnaissant pour cette seconde chance, et je le serai toujours. J’honore ce cadeau chaque jour. Même ma mère, qui connaît bien ma tendance à faire ce que je veux (ce qui est rarement ce que je devrais faire), a été impressionnée par la façon dont j’ai pris cette nouvelle chance de front. Elle a même dit à mon chirurgien, après avoir compris qu’il utilisait le facteur de « peur du pire » pour me motiver à prendre ma convalescence très au sérieux, quand j’étais sur le point de quitter mes 10 jours de « vacances » en soins intensifs : « Docteur, mon fils a son propre système solaire ; dites-lui les choses comme elles sont, sinon il n’envisagera même pas de suivre vos instructions. » Je vous l’ai dit, ma mère est une dure-à-cuire. Mais c’était une bonne chose quand mon chirurgien m’a dit que je devais suivre ses recommandations à la lettre, ou bien je serais mort dans les cinq ans à venir, et que tous les efforts déployés pour me sauver auraient été totalement vains. Dit comme ça, ça manque de poésie, mais c’est clair. Dans mon cas, c’était motivant. En réalité, le message était déjà clair pour moi avant ce « fais ce que je te dis ou meurs pour rien ». Et si ce texte peut donner l’impression que je prends tout ça à la légère, croyez-moi, ce n’est pas le cas. Pas du tout. Au contraire, c’est intensément réel… Chaque jour.
Je ne vais pas mentir, je suis inquiet. Je sais que ce que je vis actuellement n’est pas “normal”, même pour moi. Le bilan de l’année dernière était préoccupant, surtout pour ma greffe biologique qui se dégrade à un rythme alarmant, ce qui pourrait conduire à une issue dévastatrice si les tests d’aujourd’hui ne donnent pas de meilleurs résultats. Alors, à quoi m’attendre ? Je ne sais pas. La vérité, et de bonnes nouvelles, j’espère. Je déteste les faux-semblants bien plus que je “déteste” passer du temps à l’hôpital (enfin… je “déteste” ça quand je suis impliqué, mais je suis un fervent défenseur de l’hôpital quand il s’agit de ceux que j’aime et qui sont importants pour moi. C’est ce qu’on appelle un paradoxe. Je le sais parce que j’en ai quelques uns !). J’ai une confiance totale en mes spécialistes, et j’ai eu la chance de devenir un ami proche de mon cardiologue. Il est même venu enregistrer des chansons à mon studio avec son groupe de musique, composé des membres de sa famille. C’est l’une des personnes les plus incroyablement bienveillantes et attentionnées que j’aie rencontrées dans ma vie. Son soutien envers mon état dépasse largement ma santé physique, car c’est lui qui m’a accompagné à travers l’aspect émotionnel de ma récupération post-chirurgicale et qui m’a guidé dans mes problèmes cognitifs persistants. Pas besoin de dire que je suis entre de très bonnes mains. C’est rassurant. C’est un privilège inestimable pour moi. Le reste, c’est le reste, et je n’ai aucun contrôle sur celui-ci. Je dois suivre la mécanique de tout cela et respecter tout le processus qui en découle. Il y a une grande mesure de reconnaissance dans le lâcher-prise, dans la foi en ce qui sublime notre illusion de besoin de contrôle, en ce qui soumet notre vision trompeuse de la réalité… Et c’est là-dessus que je me concentre en ce moment.
Je ne vais pas mentir, je suis inquiet. Je sais que ce que je vis actuellement n’est pas “normal”, même pour moi. Le bilan de l’année dernière était préoccupant, surtout pour ma greffe biologique qui se dégrade à un rythme alarmant, ce qui pourrait conduire à une issue dévastatrice si les tests d’aujourd’hui ne donnent pas de meilleurs résultats. Alors, à quoi m’attendre ? Je ne sais pas. La vérité, et de bonnes nouvelles, j’espère. Je déteste les faux-semblants bien plus que je “déteste” passer du temps à l’hôpital (enfin… je “déteste” ça quand je suis impliqué, mais je suis un fervent défenseur de l’hôpital quand il s’agit de ceux que j’aime et qui sont importants pour moi. C’est ce qu’on appelle un paradoxe. Je le sais parce que j’en ai quelques uns !). J’ai une confiance totale en mes spécialistes, et j’ai eu la chance de devenir un ami proche de mon cardiologue. Il est même venu enregistrer des chansons à mon studio avec son groupe de musique, composé des membres de sa famille. C’est l’une des personnes les plus incroyablement bienveillantes et attentionnées que j’aie rencontrées dans ma vie. Son soutien envers mon état dépasse largement ma santé physique, car c’est lui qui m’a accompagné à travers l’aspect émotionnel de ma récupération post-chirurgicale et qui m’a guidé dans mes problèmes cognitifs persistants. Pas besoin de dire que je suis entre de très bonnes mains. C’est rassurant. C’est un privilège inestimable pour moi. Le reste, c’est le reste, et je n’ai aucun contrôle sur celui-ci. Je dois suivre la mécanique de tout cela et respecter tout le processus qui en découle. Il y a une grande mesure de reconnaissance dans le lâcher-prise, dans la foi en ce qui sublime notre illusion de besoin de contrôle, en ce qui soumet notre vision trompeuse de la réalité… Et c’est là-dessus que je me concentre en ce moment.

Alors, on verra comment ça se passe… Je vous tiendrai au courant des résultats de mes tests quand ils arriveront dans quelques jours, et ce, depuis ma maison en Virginie, où je me dirige juste après mon séjour à l’hôpital. Je n’arrive pas à croire que je n’ai passé que 2 semaines à la maison depuis mon départ en janvier 2024… C’est exactement ce que mon corps, mon cœur et mon esprit désirent en ce moment : un voyage significatif dans l’un des seuls endroits où je peux ressentir la paix et le réconfort… la maison.
Merci à vous tous pour votre affection à mon égard, c’est le cadeau le plus puissant que je puisse souhaiter. Vous êtes précieux pour moi.
Prenez soin de vous, et donnez-moi de vos nouvelles lorsque vous avez un moment.
Votre frère et ami,
Alex
Merci à vous tous pour votre affection à mon égard, c’est le cadeau le plus puissant que je puisse souhaiter. Vous êtes précieux pour moi.
Prenez soin de vous, et donnez-moi de vos nouvelles lorsque vous avez un moment.
Votre frère et ami,
Alex